22Juillet 2022 | Championnats. OPEN DE FRANCE . 20 Juillet 2022 | Championnats. OPEN DE FRANCE EPINAL. LES ACTUS PRĂCĂDENTES. 15/07 > Une belle dĂ©lĂ©gation vosgienne Ă MULHOUSE. 30/06 > LE CIRCUIT DES MEETINGS DANS LES VOSGES CE WEEK END. 25/06 > CHAMPIONNATS DE FRANCE EITE, REGIONAUX CADETS JUNIORS, DEPARTEMENTAUX
FĂ©mininesFĂ©minines D1Vie de la Ligue GPSO 92 Issy Ă l'Ă©preuve de l'Olympique Lyonnais La onziĂšme journĂ©e du championnat de D1 Arkema sera marquĂ©e notamment par le dĂ©placement du promu francilien, GPSO 92 Issy, sur la pelouse de l'Olympique Lyonnais. Un Everest pour la formation IssĂ©enne qui dĂ©fendra toutefois ses chances Ă fond. Le leader, le PSG, recevra l'Ă©quipe du Havre. Se ...1587 DĂ©but du troisiĂšme voyage de Davis dans l'Arctique. John Davis reprit la mer le 19 mai 1587 pour son troisiĂšme voyage. Cette fois, le Sunneshine et le trois-mĂąts basque Elizabeth de Dartmouth devaient se livrer Ă la pĂȘche de la morue pendant que Davis, dans la pinasse de 20 tonneaux Ellen (HelĂšne) de Londres, poursuivrait ses
Et voici la solution pour dernier ensemble de DCE avancĂ© sur FIFA 22 Hybride Ligues et Pays. Solution DCE â Hybride Ligues et Pays sur FIFA 22 Si il manque du collectif, suffit de check le bouclier sur la carte des joueurs fidĂ©litĂ© / loyautĂ©. Si vous ne savez pas ce que câest, alors lisez lâarticle en lien ICI. Faites Ă©galement bien attention au poste des joueurs notamment les MC/MDC/MOC et les MG/AG, MD/AD. Le challenger NationalitĂ©s Exactement 2 Championnats Exactement 3 Joueurs â mĂȘme pays Maximum 6 Joueurs â mĂȘme championnat Maximum 6 QualitĂ© joueurs Or Collectif Minimum 100 AvancĂ© NationalitĂ©s Exactement 3 Championnats Exactement 5 Joueurs â mĂȘme pays Maximum 5 Joueurs â mĂȘme championnat Maximum 5 Note dâĂ©quipe Minimum 79 Collectif Minimum 100 Diabolique NationalitĂ©s Exactement 6 Championnats Exactement 6 Joueurs â mĂȘme pays Maximum 3 Joueurs â mĂȘme championnat Maximum 3 Note dâĂ©quipe Minimum 81 Collectif Minimum 90 MaĂźtre Puzzle NationalitĂ©s Exactement 9 Championnats Exactement 7 Joueurs â mĂȘme club Maximum 3 Note dâĂ©quipe Minimum 82 Collectif Minimum 85 Attention loyautĂ© Pour ne rien rater de lâactualitĂ© de FIFA 22, rendez-vous sur la page Facebook ou le Twitter de FUT with Apero !
Ilaffiche Ă©galement les moyennes de ping, de perte de paquets et de gigue pour les parties en ligne de FIFA 21 et FIFA 22 jouĂ©es sur ce FAI, depuis votre position lorsque vous utilisez une connexion Ethernet (filaire). Ă lâaide du graphique, vous pouvez Ă©galement consulter les moyennes quotidiennes pour le score de connexion, le ping, la perte de paquets et la 1La rigueur quâimpose lâexercice, et le caractĂšre quâon pourrait juger polĂ©mique de la question posĂ©e, nous conduisent dâabord Ă dĂ©finir clairement chacun des termes utilisĂ©s dans le titre. 2Quâentend-on par pays pauvres » ? Sans mĂ©connaĂźtre les ambiguĂŻtĂ©s qui gravitent autour de cette expression, portant notamment sur la diffĂ©rence entre pays pauvres et populations pauvres, nous nous alignerons sur lâorthodoxie en suivant les rapports du Programme des Nations unies pour le DĂ©veloppement PNUD1. LâĂ©dition publiĂ©e en 2006 â qui se rĂ©fĂšre Ă des chiffres de 2003 â confirme dans la typologie une Ă©volution qui nâest pas anodine sur les 177 pays couverts, les 57 premiers sont considĂ©rĂ©s comme Ă dĂ©veloppement humain Ă©levĂ© », les 88 suivants comme Ă dĂ©veloppement humain moyen », et les 32 derniers dont 30 en Afrique comme Ă faible dĂ©veloppement humain ». Ainsi a-t-on isolĂ© les plus pauvres parmi les pauvres2. 3Cette derniĂšre catĂ©gorie nous conforte dans le projet de prendre lâessentiel de nos exemples en Afrique subsaharienne, puisque, Ă quelques centiĂšmes de points prĂšs, tous les pays appartenant Ă cet ensemble3 pourraient ĂȘtre rangĂ©s dans le groupe des pays Ă faible dĂ©veloppement humain. Ne sortent du lot que Sao TomĂ©, le Gabon, la GuinĂ©e Ă©quatoriale et le Cap Vert, câest-Ă -dire des petits pays Ă fort revenus pĂ©troliers. 4Quâest-ce quâun modĂšle » ? Il y aurait, lĂ encore, matiĂšre Ă dĂ©bat Ă©pistĂ©mologique Brunet, 2000, mais nous nous en Ă©loignerons en choisissant lâorigine italienne du terme, qui vient de moule » et qui suggĂšre la reproduction. Ce parti pris facilite les choses, car câest davantage dans le registre de lâĂ©conomie politique que sâinscrivent les modĂšles mondialisĂ©s » dont il sera question ici. Naturellement, il faudrait prĂ©ciser ce que nous entendons par mondialisation », mais ressurgit le spectre de la querelle sans fin sur les multiples dĂ©finitions du mot, sur le nombre de mondialisations » dĂ©jĂ connues par la planĂšte, sur la diffĂ©rence entre mondialisation » et globalisation », etc. 5Nous prenons le risque dâappeler mondialisation » le vaste mouvement contemporain de recouvrement du monde par des modĂšles considĂ©rĂ©s par les pays riches comme ayant vocation Ă lâuniversalitĂ©. Ces modĂšles sont dâabord de nature Ă©conomique ; ils sont Ă©galement â et pour certains par voie de consĂ©quence â de natures politique4, sociale, culturelle et environnementale. 6Enfin, parler de transfert de modĂšles », câest dĂ©jĂ donner une indication sur la rĂ©ponse qui sera donnĂ©e Ă la question initiale la mondialisation est-elle le stade suprĂȘme de la colonisation ? ». DĂšs quâon Ă©voque une forme dâappui, dâassistance, dâaide, on est dans un processus de domination. Vers la pensĂ©e unique » La thĂ©orie lâavĂšnement du nĂ©olibĂ©ralisme 7Le colonialisme, ou comment se passer du cours de lâhistoire⊠Pour bien saisir la rĂ©alitĂ© des choses, il faut remonter cinquante ans en arriĂšre, Ă lâorigine du mot dĂ©veloppement », quâon trouve par dĂ©faut » car il parle de sous-dĂ©veloppement » dans un discours prononcĂ© par le prĂ©sident amĂ©ricain Harry Truman le 20 janvier 1949 8 Nous devons utiliser notre avance scientifique et notre savoir-faire industriel pour favoriser lâamĂ©lioration des conditions de vie et de la croissance Ă©conomique dans les pays sous-dĂ©veloppĂ©s. » 9Le contexte est particulier le plan Marshall initiative amĂ©ricaine commence Ă porter ses fruits dans une Europe occidentale qui, certes, se reconstruit, mais dans un Ă©tat de subordination par rapport aux USA ; et, en mĂȘme temps, Truman Ă©vite dâutiliser le terme pays colonisĂ©s » pour ne pas froisser les pays colonisateurs, avec qui il compte faire alliance pour arrimer les pays pauvres au monde libre ». 10Ce qui transparaĂźt surtout dans ce discours, câest quâil impose le modĂšle de la sociĂ©tĂ© industrielle occidentale comme rĂ©fĂ©rence universelle. Pour le prĂ©sident amĂ©ricain, tous les Ătats doivent suivre le chemin parcouru aux xviiie et xixe siĂšcles par les grandes puissances, câest-Ă -dire viser la croissance Ă©conomique par lâindustrialisation, en appliquant les mĂȘmes politiques libĂ©rales investissement privĂ© et libre-Ă©change commercial. 11Il ne fait lĂ que suivre la pensĂ©e Ă©conomique dominante du moment, qui sera reprise par le courant nĂ©o-Ă©volutionniste de Walt Whitman Rostow 1916-2003 dans sa thĂ©orie du parcours obligĂ© ». Lâauteur Ă©labore un axe de dĂ©veloppement » passant par 5 Ă©tapes, qui reprend une idĂ©e formulĂ©e par Friedrich List 5 en 1841, et qui postule que toutes les sociĂ©tĂ©s doivent obligatoirement passer par les mĂȘmes stades pour atteindre lâobjectif ultime de dĂ©veloppement qui, selon Rostow, est la sociĂ©tĂ© de consommation ». 12Ainsi se met en place progressivement un corpus thĂ©orique, reposant sur la prioritĂ© aux investissements rentables et sur lâaccumulation du capital. Il sâagit ni plus ni moins que de lâĂ©mergence dâune forme exacerbĂ©e de libĂ©ralisme Ă©conomique, enrichie par les apports de David Ricardo 1817 qui recommandait, aprĂšs Adam Smith 1776, que chaque pays se spĂ©cialise dans le secteur oĂč il Ă©tait en mesure de produire une denrĂ©e peu onĂ©reuse et facilement exportable thĂ©orie dite des avantages comparatifs » 6. La formalisation de ce courant de pensĂ©e, dont on dit quâil Ă©manait de Margaret Thatcher et Ronald Reagan, intervient fort Ă propos en 1990, au moment oĂč le monde devient unipolaire câest le Consensus de Washington, sous la signature de John Williamson. 13Dans les dix commandements » de ce nouvel Ă©vangile du capitalisme, le modĂšle proposĂ© sâappuie Ă la fois sur une stricte orthodoxie budgĂ©taire et sur les lois du marchĂ©. On y relĂšve Ă©galement des prĂ©conisations lourdes de consĂ©quences pour les pays pauvres. Certaines auraient dĂ» sâavĂ©rer positives, comme lâappel Ă la libĂ©ralisation totale du commerce, de nature Ă favoriser leurs exportations. Dâautres recĂšlent des piĂšges, comme le dogme de la privatisation des entreprises publiques, ou encore â dâune maniĂšre plus insidieuse â la garantie du droit de propriĂ©tĂ© intellectuelle. Les outils la montĂ©e en puissance de la gouvernance mondiale 14Les outils pour appliquer ces principes ont Ă©tĂ© créés dĂšs juillet 1944 Ă Bretton Woods. Il est intĂ©ressant de noter que la communautĂ© internationale â rĂ©duite, il est vrai, aux pays occidentaux â a jugĂ© plus urgent de sâoccuper dâĂ©conomie que de paix, puisque lâOrganisation des Nations unies ONU nâa vu le jour que onze mois plus tard. Ainsi sont nĂ©s le Fonds monĂ©taire international FMI, destinĂ© Ă encadrer la nouvelle politique Ă©conomique des pays dits libres », et la Banque mondiale, chargĂ©e dans un premier temps dâattribuer des prĂȘts pour la reconstruction des pays dĂ©truits ou fortement touchĂ©s. Bien que les Ătats-Unis aient manifestĂ© leur indĂ©pendance en lançant parallĂšlement un plan Marshall sur la base dâaccords bilatĂ©raux, on Ă©tait dâores et dĂ©jĂ en prĂ©sence dâune forme avancĂ©e de gouvernance mondiale. 15Il manquait toutefois un maillon important dans la chaĂźne dĂ©cisionnelle Ă vocation planĂ©taire qui se mettait en place une organisation internationale du commerce, chargĂ©e dâĂ©laborer et de faire respecter des rĂšgles communes Ă tous les pays capitalistes. De fait, il fallut attendre 1947 pour que soit créé le GATT General Agreement on Tariffs and Trade, qui ne rĂ©unissait dans un premier temps que 23 Ătats en raison de la bipolarisation du monde7. 16Au lendemain de lâeffondrement du bloc soviĂ©tique, les ralliements sont nombreux puisque la signature de lâUruguay Round en 1994 Ă Marrakech est lâoccasion pour 113 pays de sâentendre pour crĂ©er lâOrganisation mondiale du commerce OMC. Aujourdâhui, avec lâadmission du Vietnam â et en attendant la prochaine entrĂ©e de la Russie â plus de 150 Ătats ont de facto adhĂ©rĂ© Ă lâultralibĂ©ralisme Ă©conomique. 17Toutefois, avec le temps, la nature des rĂ©gulations Ă©conomiques a Ă©voluĂ©. Si les sommets de lâOMC continuent de donner le tempo au commerce international, les firmes multinationales pĂšsent dâun poids de plus en plus lourd dans lâĂ©laboration des rĂšgles. Elles exercent sur les institutions de la gouvernance mondiale un lobbying constant qui se manifeste notamment, chaque annĂ©e depuis 1970, lors du World Economic Forum Ă Davos. Cette rencontre devenue mythique nâa aucune lĂ©gitimitĂ© gouvernementale, puisque chaque participant sây inscrit Ă titre personnel, mais câest bien lĂ que sont prises ou rĂ©orientĂ©es les grandes dĂ©cisions rĂ©gissant lâavenir Ă©conomique de la planĂšte. Il est significatif de constater que les chefs dâĂtat, en particulier ceux des pays riches, ratent rarement les rendez-vous de Davos, ce haut lieu de la pensĂ©e unique Ă la gloire de la flexibilitĂ© et de la mondialisation », ainsi que le dĂ©finissait en 1996⊠Jacques Chirac. Le terrain postcolonial comme champ dâapplication 18La seconde moitiĂ© du xxe siĂšcle a donc donnĂ© lieu Ă lâĂ©mergence dâune doctrine Ă©conomique devenue exclusive au dĂ©but des annĂ©es 1990, et Ă la mise en place dâinstitutions incontournables chargĂ©es de sa mise en Ćuvre Ă lâĂ©chelle planĂ©taire. ParallĂšlement, le vaste mouvement de dĂ©colonisation, initiĂ© au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, a sinon redessinĂ© du moins recoloriĂ© la carte du monde, transformant les pays colonisĂ©s en pays politiquement indĂ©pendants sans pour autant les sortir de la dĂ©pendance Ă©conomique ni de la pauvretĂ©. Les lignes du Tiers Monde nâont rĂ©ellement commencĂ© Ă bouger quâĂ lâaube du xxie siĂšcle. 19Pour les thĂ©ories Ă©conomiques nĂ©olibĂ©rales, les pays pauvres ont constituĂ© un champ dâapplication original. En effet, la plupart dâentre eux avaient connu des modĂšles Ă©conomiques fortement administrĂ©s, soit parce quâils sâĂ©taient rangĂ©s dans le camp du bloc communiste, soit parce quâils avaient conservĂ© les principes de lâancienne puissance coloniale. De fait, la plupart des anciennes colonies françaises fonctionnaient selon des principes keynĂ©siens que nul ne semblait vouloir remettre en question. Il nây avait pas, disait-on, de vĂ©ritable culture entreprenariale dans les pays de lâAfrique subsaharienne8. Par ailleurs, le secteur public permettait dâabsorber une partie importante du croĂźt dĂ©mographique, et force est bien de constater quâon a longtemps fermĂ© les yeux sur cette forme dâĂ©quilibre socio-Ă©conomique. 20Puis est venu le temps oĂč les bilans du dĂ©veloppement » se sont rĂ©vĂ©lĂ©s de plus en plus nĂ©gatifs non seulement les pays les plus pauvres ne dĂ©collaient » pas, mais ils affichaient des pratiques Ă©conomiques et surtout budgĂ©taires tout Ă fait contraires Ă lâorthodoxie prĂŽnĂ©e par les institutions de Bretton Woods, de telle sorte quâils ont Ă©tĂ© non pas simplement invitĂ©s Ă Ă©pouser la dynamique libĂ©rale qui recouvrait progressivement le monde, mais obligĂ©s dâen passer par des traitements â au sens mĂ©dical du terme â Ă©laborĂ©s par le FMI et la Banque mondiale et reposant sur lâ ajustement structurel ». 21Ce processus Ă©tait probablement nĂ©cessaire. Pour autant, il ne sâagit pas moins dâun transfert de modĂšles mondialisĂ©s. Ătait-il sous-tendu par une idĂ©ologie nĂ©o-coloniale ? Le recouvrement du monde Lâajustement, la dette, et la dĂ©liquescence des Ătats 22Câest Ă la fin des annĂ©es 1970 que les institutions financiĂšres internationales et les pays industrialisĂ©s ont imposĂ© des Programmes dâAjustement Structurels PAS » aux pays pauvres dont les situations Ă©conomique et financiĂšre Ă©taient devenues dĂ©sastreuses. Il sâagissait tout simplement dâappliquer plusieurs des piliers du Consensus de Washington rĂ©duction drastique des dĂ©penses publiques, ouverture des Ă©conomies nationales Ă la concurrence internationale, privatisations massives. Moyennant quoi, ces pays pourraient continuer Ă accĂ©der aux prĂȘts de la communautĂ© internationale. 23Il va sans dire que les premiers plans de ce type eurent des effets catastrophiques. Dâabord, lâinterdiction de subventionner les produits de premiĂšre nĂ©cessitĂ© au nom de la libertĂ© des marchĂ©s conduisit, dans de nombreuses capitales, Ă des Ă©meutes de la faim. Ensuite, et conformĂ©ment aux recommandations des institutions de Bretton Woods, les budgets sociaux furent considĂ©rablement et prioritairement rĂ©duits. En consĂ©quence, les effectifs de la fonction publique furent dĂ©graissĂ©s », et, parallĂšlement, les salaires des fonctionnaires furent cristallisĂ©s, ce qui ne pouvait que gĂ©nĂ©rer la corruption, notamment dans les secteurs de la police, de la douane, et de la justice. Ainsi Ă©tait dâavance condamnĂ© lâĂtat de droit. 24Mais des mesures plus pernicieuses Ă terme furent mises en Ćuvre, comme le gel des crĂ©ations de postes pour les enseignants notamment du primaire et la baisse de leur niveau de recrutement, afin de pouvoir les payer moins cher pour maintenir en lâĂ©tat le fossĂ© du savoir ?. Ainsi la Banque mondiale a-t-elle fini par imposer Ă la CĂŽte-dâIvoire, pourtant trĂšs attachĂ©e Ă lâexcellence de son systĂšme dâĂ©ducation, de recruter ses instituteurs Ă bac â 3 et de les former en un an, alors quâils Ă©taient autrefois engagĂ©s au niveau baccalaurĂ©at et formĂ©s en deux ans9. 25Cette politique injonctive en direction des systĂšmes Ă©ducatifs Ă©tait conduite au nom des Ă©quilibres macroĂ©conomiques Hugon, 2002. Elle a Ă©tĂ© soutenue par la CoopĂ©ration française, relayĂ©e par lâAgence Française de DĂ©veloppement AFD et alimentĂ©e par les Ă©tudes de lâIREDU Institut de Recherches sur lâĂducation de lâUniversitĂ© de Bourgogne. La nĂ©cessitĂ© dâĂ©conomiser sur les budgets sociaux sâest Ă©galement appliquĂ©e aux systĂšmes de santĂ©, poussant mĂȘme jusquâĂ faire exiger par les Ă©tablissements de soins une participation obligatoire des patients, y compris les plus dĂ©munis, au nom dâune logique » de recouvrement des coĂ»ts qui sâapparentait Ă une privatisation dĂ©guisĂ©e Mestre, 2003. 26ParallĂšlement les institutions financiĂšres internationales exigeaient des Ătats ainsi assistĂ©s des efforts considĂ©rables dans le sens de la bonne gouvernance ». Ce nouveau concept, qui depuis a fait florĂšs, soulignait lâimportance dâune machine Ă©tatique forte, compĂ©tente et honnĂȘte pour conduire Ă bon terme les politiques dâajustement. Or, compte tenu, dâune part, de la fragilisation des secteurs rĂ©galiens et sociaux, et, dâautre part, de lâaccumulation de la dette dont le remboursement consommait lâessentiel des budgets nationaux, les Ătats Ă©taient entrĂ©s en dĂ©liquescence ils ne maĂźtrisaient plus les dĂ©cisions, dĂ©sormais dictĂ©es de Washington, et ne contrĂŽlaient plus lâexĂ©cution, puisque la fonction publique Ă©tait progressivement minĂ©e par la corruption pour cause de paupĂ©risation accĂ©lĂ©rĂ©e. 27Câest dans ce contexte que fut engagĂ©e en 1996 lâinitiative PPTE Pays Pauvres TrĂšs EndettĂ©s, programme concernant les 38 pays les plus pauvres du monde dont 32 en Afrique subsaharienne10, pour lesquels les institutions de Bretton Woods et les autres bailleurs de fonds concernĂ©s acceptaient de transformer une partie du service de la dette en investissements dans les secteurs de la santĂ© et de lâĂ©ducation. Bien que rĂ©visĂ© en 1999 initiative PPTE renforcĂ©e, le dispositif nâa pas eu les effets escomptĂ©s, dâabord parce que la conversion de la dette Ă©tait, dans la plupart des cas, une opĂ©ration fictive en raison de lâinsolvabilitĂ© chronique des Ătats. Ensuite parce que les pays riches continuaient dâĂȘtre les prescripteurs en Ă©laborant les politiques notamment sociales des pays pauvres Ă leur place ; mais lâĂ©mergence dâune orientation spĂ©cifique en direction dâun sous-groupe de pays pouvait laisser supposer quâon avait enfin compris lâineptie des remĂšdes Ă vocation universelle11. Enfin, la question de la dette apparaissait de plus en plus, Ă la faveur des dĂ©bats ouverts autour des PPTE, comme un problĂšme moral et non plus comme un simple paramĂštre comptable. Le processus dĂ©mocratique, maillon faible du transfert 28Est-ce pour introduire davantage de vertu dans lâensemble des mĂ©canismes que les pays riches essayaient de transfĂ©rer ? Toujours est-il quâune injonction apparemment non marchande sâinsĂ©ra, au dĂ©but des annĂ©es 1990, au sein des prĂ©conisations Ă vocation universelle le processus dĂ©mocratique. Le conseil ne vint pas de la gouvernance mondiale, mais de La Baule oĂč François Mitterrand avait lancĂ©, sans trop de risques politiques puisque le monde Ă©tait unipolaire depuis quelques mois, la phrase devenue cĂ©lĂšbre Le vent de libertĂ© qui a soufflĂ© Ă lâEst devra inĂ©vitablement souffler un jour en direction du Sud » 20 juin 1990. Il reconnaissait implicitement que, pour la plupart dâentre eux, les pays africains avaient vĂ©cu sous des rĂ©gimes autoritaires et liberticides, sans quâon ne sâen Ă©meuve outre mesure au Nord. Mais il pensait probablement, avec lâappui de la communautĂ© internationale, que la greffe des principes dĂ©mocratiques â tels quâils avaient Ă©tĂ© conçus en Occident â allait permettre aux populations de sâimpliquer davantage et plus directement dans les politiques de dĂ©veloppement. 29Quinze ans plus tard, le bilan pour lâAfrique subsaharienne est plus que mitigĂ©. Le transfert du processus dĂ©mocratique a rencontrĂ© de nombreux obstacles Bouquet, 2004 lâavĂšnement du multipartisme a souvent dĂ©gĂ©nĂ©rĂ© en multi-ethnisme, et parfois en vĂ©ritable guerre civile ; la logique arithmĂ©tique de la majoritĂ© Ă 50 % a bousculĂ© dans bien des cas la culture traditionnelle du consensus ; enfin â mais les idĂ©ologues du nĂ©o-libĂ©ralisme nây avaient-ils pas pensĂ© ? â la libertĂ© dâexpression favorise, par essence, la demande voire lâexigence dâune meilleure redistribution des richesses. Câest donc une cause potentielle dâinstabilitĂ© politique â de Gaulle aurait parlĂ© de chienlit » â peu prisĂ©e des investisseurs. 30On pourrait pointer lĂ une contradiction. Et pourtant la gouvernance mondiale a non seulement maintenu comme une conditionnalitĂ© absolue de son aide la mise en place de la dĂ©mocratie, mais a Ă©galement poussĂ© le transfert jusque dans ses derniers avatars en encourageant fortement le processus de dĂ©centralisation. Alors que lâunitĂ© nationale12 Ă©tait rarement rĂ©alisĂ©e dans les pays pauvres, la Banque mondiale a appuyĂ© la mise en place de collectivitĂ©s dĂ©centralisĂ©es, sur le modĂšle hexagonal dans les ex-colonies françaises. Parmi les arguments avancĂ©s en faveur de cette idĂ©e, il y avait encore une fois la volontĂ© dâimpliquer les populations au plus prĂšs des projets de dĂ©veloppement, mais aussi de mieux intĂ©grer les diffĂ©rences communautaires pour Ă©viter de dire ethniques ». Les rĂ©sultats de cette politique sont contrastĂ©s ainsi le Mali a-t-il renoncĂ© Ă tracer des frontiĂšres communales13, qui nâavaient aucun sens dans lâoccupation traditionnelle de lâespace sahĂ©lien. Par ailleurs, dans de nombreux cas, la dĂ©mocratie locale a Ă©tĂ© tout aussi souvent dĂ©voyĂ©e de son sens que sa dĂ©clinaison nationale, favorisant le mĂ©lange des genres entre politique et business et dĂ©crĂ©dibilisant davantage encore un modĂšle quâon croyait incontestable. 31Est-ce Ă dire que le modĂšle dĂ©mocratique peut connaĂźtre une application Ă gĂ©omĂ©trie variable ? Au chapitre des droits de lâhomme, pourtant garantis par une dĂ©claration universelle », certains ne sont pas loin de le penser, ainsi quâil apparaĂźt dans la dĂ©claration de Jacques Chirac Ă Tunis le premier des droits de lâHomme, câest de manger, dâĂȘtre soignĂ©, de recevoir une Ă©ducation et dâavoir un habitat » 3 dĂ©cembre 2003. Et si lâon consultait â dĂ©mocratiquement â sur le sujet ceux qui sont privĂ©s de ces fondamentaux » ? Les effets pervers de la marchandisation du monde 32Dans le domaine de lâĂ©conomie, parmi les rĂšgles intangibles imposĂ©es au monde, celles ayant trait Ă la propriĂ©tĂ© privĂ©e et Ă la privatisation ont Ă©tĂ© appliquĂ©es dans les pays du Sud sans prĂ©caution, parce que sans inquiĂ©tude. En effet, avec lâeffondrement des utopies communistes, le slogan de Proudhon La propriĂ©tĂ©, câest le vol » ne compte plus guĂšre dâadeptes dans les pays riches, intĂ©gralement gagnĂ©s Ă la sociĂ©tĂ© de consommation. Il nây a guĂšre que sur la propriĂ©tĂ© intellectuelle quâon entende parfois, du cĂŽtĂ© des altermondialistes, quelques protestations rĂ©siduelles14. 33De telle sorte quâĂ propos de ce quâon croyait ĂȘtre un bien public mondial », câest-Ă -dire lâeau, le quatriĂšme principe de la dĂ©claration de Dublin Lâeau utilisĂ©e Ă de multiples fins a une valeur Ă©conomique et devrait donc ĂȘtre reconnue comme un bien Ă©conomique » 1992, sans faire rĂ©ellement lâunanimitĂ©, ne suscita pas le tollĂ© quâon aurait pu imaginer. Peu aprĂšs, la crĂ©ation du Conseil mondial de lâEau en 1994 constitua lâune de ces dĂ©cisions Ă vocation planĂ©taire qui annonce un nouveau transfert de modĂšle. De fait, le postulat Ă©tait difficilement contestable lâeau potable ayant un coĂ»t, elle a aussi un prix et doit donc ĂȘtre traitĂ©e comme un produit de consommation ordinaire. 34Dans les pays pauvres, et notamment en Afrique subsaharienne, la distribution de lâeau a longtemps Ă©tĂ© considĂ©rĂ©e comme relevant dâun service public et confiĂ©e Ă des sociĂ©tĂ©s dâĂtat. Force est bien de constater que celles-ci ont gĂ©nĂ©ralement sombrĂ© dans la gabegie, facilitant ainsi le passage au secteur privĂ©, exigĂ© non sans raison par les institutions de Bretton Woods. MalgrĂ© quelques dĂ©boires en AmĂ©rique latine, les grandes multinationales de lâeau et de lâassainissement OndĂ©o ex-Suez-Lyonnaise, VĂ©olia ex-Vivendi et Saur-Bouygues ont donc pris pied sur le continent africain. Et, un beau jour, lâeau des fontaines publiques devint payante15. 35Pour prendre un exemple rĂ©cent, câest ainsi quâen octobre 2004 toutes les bornes-fontaines en libre accĂšs dâAntananarivo Madagascar, datant pour la plupart de la colonisation française, ont Ă©tĂ© remplacĂ©es par des points dâeau collectifs » flanquĂ©s de guĂ©rites oĂč des fontainiers percevaient une redevance16 pour chaque rĂ©cipient rempli. Cette opĂ©ration avait reçu lâaval de bon nombre dâONG dites humanitaires, qui relayaient sans sourciller les nouveaux arguments Ă©laborĂ©s par la gouvernance mondiale un point dâeau encadrĂ© est garant du non-gaspillage, de la propretĂ© des rĂ©cipients et donc de lâhygiĂšne, de lâentretien du lieu pour Ă©viter la dĂ©gradation environnementale, Il est vrai quâil y avait, Ă la clĂ©, quelques marchĂ©s concessionnaires dont les associations caritatives sont de plus en plus friandes. TrĂšs peu ont pris conscience du fait que les plus dĂ©munis, câest-Ă -dire presque tous dans les quartiers prĂ©caires de la capitale, nâavaient dâautres ressources que les marigots, les fossĂ©s et les caniveaux. 36Ă la recherche de lâintrouvable Ă©quitĂ©, certains avancent une argumentation allĂ©chante lâeau potable a un coĂ»t, donc un prix, mais elle a Ă©galement une valeur ». Non marchande ? 37Si lâon affirme, Ă juste titre, que lâeau potable nâa pas rĂ©ellement fait lâobjet dâune privatisation », on ne peut en dire autant de la terre, du moins en Afrique subsaharienne. Au dĂ©but des annĂ©es 1990, la Banque mondiale a dĂ©cidĂ© de sĂ©curiser » les terres des paysans. Il sâagissait de revenir sur la belle utopie du rĂ©gime foncier prĂ©colonial en ce temps-lĂ , la terre appartenait » Ă celui qui la cultivait. Selon la mĂȘme logique, dans les vastes espaces sahĂ©liens faiblement peuplĂ©s, les arbres appartenaient » Ă ceux qui les avaient plantĂ©s. Ainsi les Ă©leveurs nomades du Tchad oriental pouvaient-ils rĂ©colter, Ă chaque passage annuel de leurs troupeaux sur les pĂąturages du OuaddaĂŻ, la gomme arabique des acacias quâils avaient plantĂ©s. En fait de maĂźtrise spatio-temporelle, on Ă©tait en prĂ©sence dâun modĂšle » peu banal. 38Ce modĂšle Ă©tait original, mais incompatible avec la rationalitĂ© des institutions de Bretton Woods. En accompagnement aux diffĂ©rents programmes dâajustement, des rĂ©formes fonciĂšres furent donc ordonnĂ©es afin de mettre de lâordre dans des systĂšmes qui paraissaient Ă la fois trop complexes et trop peu aptes au dĂ©veloppement ». Chaque Ătat sây employa, avec plus ou moins de bonheur car il fallait mettre en place des cadastres, parfois en partant de zĂ©ro, et surtout dĂ©finir des critĂšres dâattribution droit du sol ou droit du sang ? 39Certes, le principe de collectivisation des terres ayant Ă©chouĂ© en URSS, il nây avait dâautre choix que celui de la propriĂ©tĂ© individuelle. Mais les rĂ©formes fonciĂšres allant dans ce sens Ă marche forcĂ©e connurent des fortunes diverses. En CĂŽte-dâIvoire, les conflits sur les terres cafĂ©iĂšres et cacaoyĂšres dĂ©bouchĂšrent sur une crise gĂ©opolitique majeure, qui laissera des traces durables, dĂ©mentant ainsi la pertinence de la sĂ©curisation ». Ă Madagascar, les cultivateurs sont si pauvres quâils sâempressent de revendre leurs parcelles dĂšs quâils en sont propriĂ©taires », favorisant la constitution de grandes propriĂ©tĂ©s agricoles de type capitaliste Ă faible main-dâĆuvre, se chassant eux-mĂȘmes des campagnes, en quelque sorte. Et il est probable que les terres cotonniĂšres du Sahel africain connaĂźtront le mĂȘme sort dĂšs que les pays du Nord ne seront plus autorisĂ©s Ă subventionner leurs producteurs. Des rĂšgles Ă gĂ©omĂ©trie variable 40On entend souvent dire, notamment depuis que Pascal Lamy est directeur de lâOMC, que les rĂšgles Ă©dictĂ©es par les institutions financiĂšres internationales, notamment celles qui sont relatives au commerce â fondement de lâĂ©conomie mondiale â sont une chance pour les pays pauvres Feuer, 2006. On aimerait le croire et, pour cela, croire comme Adam Smith aux effets bienfaisants de la main invisible du marchĂ© ». 41Les planteurs de cafĂ©iers et de cacaoyers en sont probablement moins convaincus. Pendant les pĂ©riodes coloniale, puis post-coloniale, ils bĂ©nĂ©ficiaient dâun dispositif de protection fonctionnant sur le principe de la mutualisation des risques. LâĂtat, via les caisses de stabilisation des prix des matiĂšres premiĂšres, amortissait dâune annĂ©e sur lâautre les fluctuations des cours, inĂ©vitablement fixĂ©s dans les pays du Nord. LĂ encore, le systĂšme connut des dĂ©rives sĂ©rieuses, notamment en CĂŽte-dâIvoire, oĂč le prĂ©sident HouphouĂ«t-Boigny confondait volontiers lâargent de la Caistab » et sa fortune propre18. Dans nombre de pays, les Caistab servirent de pompes Ă finances pour toutes sortes dâactivitĂ©s occultes. Cela facilita la tĂąche du FMI et de la Banque mondiale lorsquâils dĂ©cidĂšrent dâappliquer lâun des piliers du Consensus de Washington la dĂ©rĂ©gulation. 42DĂ©sormais, les petits planteurs des pays du Sud sont directement et en temps rĂ©el tributaires de la variabilitĂ© des cours des matiĂšres premiĂšres. En gĂ©nĂ©ral, ceux-ci sont Ă©levĂ©s quand le pays est Ă feu et Ă sang, et sâeffondrent quand le calme et la paix reviennent⊠On remarquera que le gĂ©ant amĂ©ricain Cargill a attendu la suppression effective de la Caistab 1998 pour sâimplanter en CĂŽte-dâIvoire. Dans les premiers mois, sa surface financiĂšre lui a permis de surpayer le cacao bord-champ » et de couler la plupart de ses concurrents, dont la quasi-totalitĂ© des exportateurs nationaux. Il est actuellement numĂ©ro un sur la place, oĂč ne subsistent plus que quelques multinationales, alors que lâon comptait plus de cinquante entreprises du temps de la Caistab. 43On se prend donc Ă imaginer des mesures dĂ©rogatoires Ă ce libre-Ă©change trop strict, par exemple un filet de sĂ©curitĂ©. HĂ©las, la gouvernance mondiale paraĂźt insensible au sort des plus pauvres, alors quâelle accorde une bienveillance certaine aux pays du Nord qui continuent Ă subventionner leur coton ou leur sucre, opposant ainsi une concurrence dĂ©loyale aux pays du Sud19. On sait que la nĂ©gociation sur le sujet Ă©tait au cĆur du cycle de Doha, et Ă lâorigine de lâĂ©chec du dernier sommet de lâOMC, mais ce nâest pas rassurant pour autant. Tant que les Ătats-Unis et lâUnion europĂ©enne nâauront pas changĂ© de politique agricole, les petits producteurs du Sud devront brader leurs rĂ©coltes, au risque de devoir vendre leurs terres dĂ©sormais sĂ©curisĂ©es », et quitter les campagnes pour aller grossir les quartiers prĂ©caires des grandes villes. 44La voie ne serait-elle pas ouverte Ă la constitution dâune vĂ©ritable Cotton Belt dans le Sahel africain, contrĂŽlĂ©e par la multinationale Monsanto qui est dĂ©jĂ largement implantĂ©e au Burkina Faso ? Des incantations mondialisĂ©es 45Le xxe siĂšcle sâest achevĂ© sur un constat dâĂ©chec assez unanimement admis les rĂ©sultats de cinquante ans dâaide au dĂ©veloppement ne sâaffichaient pas Ă la hauteur de ce quâon espĂ©rait. 2 300 milliards de dollars avaient Ă©tĂ© dĂ©pensĂ©s20 sans quâon enregistre les avancĂ©es attendues en matiĂšre de croissance Ă©conomique et de rĂ©duction de la pauvretĂ© Easterly, 2006. Certes, les Ă©conomistes qui servent la Banque mondiale opposent Ă cela des tableaux macroĂ©conomiques et des courbes laissant entendre â pour qui veut bien Ă©couter â que certains pays sont en train de sâen sortir », ignorant que lâentrĂ©e dans le vert sâest faite au prix dâun fort creusement des inĂ©galitĂ©s Bourguigon, 2004. Mais la tendance est nĂ©anmoins Ă la rĂ©orientation et Ă lâaggiornamento. 46Câest ainsi que lâAgence Française de DĂ©veloppement, compagnon de route plutĂŽt loyal de la Banque mondiale, pointe de temps Ă autre les grains de sable qui grippent lâAPD Aide Publique au DĂ©veloppement, notamment la primautĂ© des intĂ©rĂȘts des pays riches ou les contradictions caractĂ©risant les relations bilatĂ©rales SĂ©vĂ©rino et Charnoz, 2005. Mais lâapproche mondialisĂ©e demeure. 47 Pour engager le xxie siĂšcle sous de bons auspices », une nouvelle rĂ©solution a Ă©tĂ© prise le 8 septembre 2000 Ă New York, et ratifiĂ©e par 189 Ătats. Elle mettait en Ćuvre un gigantesque chantier visant Ă diminuer de moitiĂ© la pauvretĂ© dâici Ă 2015. Huit Objectifs du MillĂ©naire pour le DĂ©veloppement » OMD Ă©taient dĂ©finis et prĂ©cisĂ©ment chiffrĂ©s21 il sâagissait de diviser par deux en quinze ans la proportion de gens vivant avec moins dâun dollar par jour, et/ou souffrant de la faim, et/ou nâayant pas accĂšs Ă lâeau potable. Il sâagissait Ă©galement Ă la mĂȘme Ă©chĂ©ance de scolariser tous les enfants du monde, dâassurer la paritĂ© hommes/femmes, et de stabiliser les grandes pandĂ©mies. Le septiĂšme objectif imposait un dĂ©veloppement Ă©cologiquement viable », câest-Ă -dire lâapplication dâune autre prescription nĂ©e dâune prise de conscience mondiale le protocole de Kyoto 1997. Sur ce point, on pourra sâinterroger sur la pertinence dâun modĂšle mondial environnemental », ne serait-ce quâen Ă©voquant lâabsence dâalternative au charbon de bois pour lâĂ©nergie domestique dans les pays pauvres. 48Pour parvenir aux OMD, il faudra doubler lâAPD Ă lâhorizon 2015, câest-Ă -dire atteindre enfin dans chaque pays, et sans tricher22, le pourcentage mythique de 0,7 % du PIB. On en est loin. 49On aurait pu se rĂ©jouir de la dĂ©marche solidaire que reprĂ©sentait lâengagement derriĂšre les OMD. Mais la solidaritĂ© a des limites. Un demi-siĂšcle aprĂšs avoir fait cavalier seul pour la reconstruction du monde dâaprĂšs-guerre, le gouvernement Ă©tats-unien sâest Ă nouveau dĂ©marquĂ© dâune communautĂ© financiĂšre internationale quâon croyait pourtant Ă sa botte en crĂ©ant, seul, une nouvelle agence dâaide le Compte du MillĂ©naire Millenium Challenge Account. Il sâagit dâune sorte de nouveau plan Marshall, annoncĂ© par George W. Bush le 22 mars 2002 Ă Monterrey, oĂč Ă©taient rĂ©unies toutes les grandes puissances pour tirer les leçons des attentats du 11 septembre 2001. 50Dans cette entreprise, la visĂ©e nĂ©o-coloniale a le mĂ©rite dâĂȘtre claire puisque le MCA est destinĂ© Ă financer des projets dans les pays qui gouvernent avec justice, qui investissent dans le domaine social, et qui encouragent la libertĂ© dans le domaine Ă©conomique ». 51Les pays concernĂ©s sont ceux qui acceptent de collaborer avec les USA dans la lutte contre le terrorisme, mais aussi et surtout qui ouvrent inconditionnellement leurs portes aux multinationales amĂ©ricaines. 52Le rĂ©sultat de tous ces engagements et de toutes ces politiques, câest une mainmise incontestable de la communautĂ© des pays riches sur les pays pauvres. Et pratiquement incontestĂ©e, car rares sont les pays malades de grande pauvretĂ© qui se rebiffent et refusent de recevoir dans le mĂȘme temps les ordonnances et les remĂšdes. 53Ainsi prĂ©sentĂ©, le tableau paraĂźt clair les pays pauvres sont directement gouvernĂ©s par une autoritĂ© internationale qui Ă©labore des modĂšles conçus selon ses normes propres et qui les applique dans des contextes historique et culturel Ă©trangers. Les programmes sont mis en Ćuvre de maniĂšre injonctive, avec des conditionnalitĂ©s, et, pour ceux qui ne seraient pas des bons Ă©lĂšves », des pĂ©nalitĂ©s et des sanctions. 54Ă lâĂ©vidence, il sâagit dâune vaste entreprise de domination qui ressemble Ă une recolonisation. Et on ne peut pas Ă©chapper aux dĂ©bats manichĂ©ens qui ont â autrefois et aujourdâhui â surgi de cette pĂ©riode de lâhistoire des xixe et xxe siĂšcles la colonisation Ă©tait-elle guidĂ©e par la volontĂ© de faire accĂ©der les populations des pays neufs » au bien-ĂȘtre et Ă la prospĂ©ritĂ©, ou bien par le goĂ»t du profit au bĂ©nĂ©fice des pays dĂ©jĂ riches, de leurs entreprises, et in fine de leurs propres populations ? 55Les quelques exemples Ă©voquĂ©s dans le dĂ©veloppement qui prĂ©cĂšde permettent-ils de trancher ? Dâune part, les Objectifs du MillĂ©naire pour le DĂ©veloppement portent la marque de ce devoir compassionnel » qui rassure les consciences, en enjoignant le monde Ă se liguer pour Ă©radiquer la pauvretĂ©, lâanalphabĂ©tisme et les grandes maladies. Et dâautre part les institutions financiĂšres internationales condamnent les enfants des pays pauvres Ă une Ă©ducation a minima, excluent de lâaccĂšs Ă lâeau potable les plus pauvres parmi les pauvres, prĂ©parent les petits paysans Ă lâexode sous couvert de sĂ©curisation » des terres, et, plus gĂ©nĂ©ralement favorisent le dĂ©veloppement des grandes exploitations agricoles et le recouvrement du monde par les entreprises multinationales. En outre, en gommant toute rĂ©fĂ©rence Ă la notion de service public, elles ouvrent la voie aux inĂ©galitĂ©s et Ă lâinĂ©quitĂ©23. 56En mĂȘme temps, la gouvernance mondiale suscite et encourage la crĂ©ation dâespaces de libertĂ© â le processus dĂ©mocratique â permettant aux peuples de sâexprimer librement, par exemple en donnant leur avis sur la marche du monde. On conviendra que les pays pauvres ne se font guĂšre entendre⊠57Mais, en essayant de rĂ©pondre Ă une question historiquement datĂ©e, nous avons inĂ©vitablement butĂ© sur lâambiguĂŻtĂ© dirimante de lâexercice en quelques dĂ©cennies, le monde a considĂ©rablement changĂ©, et un Ă©tat des lieux arrĂȘtĂ© au dĂ©but du xxe siĂšcle ne peut ĂȘtre analysĂ© avec les outils du xxie. On oublie trop souvent que Mozart, en son temps, composait de la musique contemporaine. 58Ainsi avons-nous implicitement fait Ă©merger des Ă©lĂ©ments nouveaux, notamment en matiĂšre de dĂ©finition des pays pauvres ». Au-delĂ des froides donnĂ©es chiffrĂ©es, fussent-elles estampillĂ©es dĂ©veloppement humain », on devrait ranger dans cette catĂ©gorie tous les Ătats dont les habitants sont totalement dĂ©munis face aux risques naturels sĂ©ismes, tsunamis, Ă©ruptions volcaniques, sĂ©cheresses, inondations, criquets,âŠ, sanitaires Ă©pidĂ©mies, pandĂ©mies,⊠et sociaux perte dâemploi, chĂŽmage,âŠ. Car la pauvretĂ©, câest aussi et peut-ĂȘtre surtout lâimpression ressentie chaque matin que tout peut arriver sans quâaucune protection ou garantie ne soit prĂ©vue pour y faire face. La mesure des inĂ©galitĂ©s face aux risques devrait ĂȘtre un nouvel indicateur de dĂ©veloppement humain24. 59Par ailleurs, la rĂ©fĂ©rence Ă la colonisation nous a ramenĂ© vers une cartographie dâĂ©poque, celle des non-alignĂ©s », de Bandoeng au rĂȘve castriste de la Tricontinentale. Or, la mondialisation â le terme de globalisation » conviendrait davantage dans ce cadre â a introduit dans ce bel ordonnancement militant des modifications sensibles Goussot, 2006. Câest ainsi que lâaxe Asie Chine, Inde â Afrique Afrique du Sud â AmĂ©rique BrĂ©sil ne partage plus vraiment le combat anticolonialiste des petits Ătats. Et ceux-ci nâont pas seulement Ă©tĂ© lĂąchĂ©s au bord du chemin vers la croissance et le dĂ©veloppement ; ils sont plus ou moins devenus les nouvelles colonies des ex-colonisĂ©s, sans pour autant que ces derniers aient rĂ©glĂ© chez eux les problĂšmes de la pauvretĂ©. Les recompositions territoriales Ă lâĆuvre au dĂ©but du xxie siĂšcle seront donc dâune lecture plus compliquĂ©e quâon ne pouvait lâimaginer au moment de la chute du mur de Berlin, mĂȘme si les nouveaux dĂ©coupages sâofficialisent peu Ă peu, notamment avec lâĂ©mergence du G20 au sein de lâOMC25. 60Enfin, lâimage du recouvrement du monde contient sa dĂ©clinaison virtuelle, invisible mais si prĂ©sente la Toile ». Sâil est vrai que les pays pauvres nâont pas connu la rĂ©volution industrielle, ils ont Ă©tĂ© touchĂ©s par la rĂ©volution de lâInternet, et, quelle que soit lâampleur de la fracture numĂ©rique, il faut y voir, certes, un nouvel instrument de domination mais aussi, par effet boomerang, la possibilitĂ© de donner Ă voir ce que le monde riche prĂ©fĂšre ne pas montrer, et donc un outil dâalerte, de sensibilisation, en mĂȘme temps quâune formidable source de savoirs pour ceux que la Banque mondiale souhaite tenir Ă lâĂ©cart au nom des grands Ă©quilibres macroĂ©conomiques. 61La mondialisation ressemble donc Ă une nouvelle forme de colonisation. Ă ce titre, elle suscite une rĂ©action sinon de rĂ©sistance du moins de contournement, de transgression ». Comme si un modĂšle Ă©conomique alternatif de survie â gĂ©nĂ©riquement qualifiĂ© dâ informel » â Ă©tait en train de se dĂ©velopper aux marges des modĂšles mondialisĂ©s »26⊠BczMof.